Introduction à la "Summa super Psalterium Philippi Cancellarii"

Valenciennes, BM, 18, f. 16r


Troyes, BM, 815, prov. Clairvaux

M. Morard, Philippi Cancellarii Parisiensis Summa super Psalterium, Paris, 2 ed., [2016] 2021 (opus in fieri). => vers l'édition

 

La Summa super Psalterium du théologien et prédicateur parisien Philippe le Chancelier (1165-1236) peut être datée des années 1225-1230 (voir plus bas). Elle n'est pas un livre glosé et ne commente qu'une sélection de versets des Psaumes. Elle n'a donc pas sa place parmi les textes édités dans Gloss-e au titre de Bible glosée mais au titre de commentaire lemmatique partiel, témoin de l'usage de la Glose et du texte de la Bible en usage à Paris dans le premier tiers du 13e siècle. Elle cite abondamment la Glose ordinaire et précède de peu les postilles d'Hugues de Saint Cher sur les Psaumes. Avec une quarantaine de manuscrits conservés et attestés, elle semble même avoir été mieux diffusée que la postille d'Hugues sur tout le Psautier, bien que l'existence de nombreuses éditions imprimées cette dernière puisse expliquer une moindre conservation de ses exemplaires manuscrits. La Summa est aussi porteuse de leçons de la Bible en usage au moment où  commençait le travail de standardisation du texte de la Vulgate (Bible des libraires de Paris) et de corrections de cette même Vulgate (Bible des maîtres de Paris) d'où émergera progressivement l'artefact philologique que l'historiographie moderne a coutume d'appeler "Bible parisienne " ou "Bible de l'Université". Beaucoup la confondent encore avec le texte de la Bible à 42 lignes imprimée par Gutenberg en 1452/1455 à Mayence, laquelle n'est que la première version imprimée du texte parisien mais l’un des derniers avatars de ses évolutions médiévales.

Le Summa  a donc pleinement sa place ici comme contre-point et à titre expérimental. Il importe en effet à l'historien non seulement de comparer les textes de même nature mais aussi de croiser des sources de nature différente pour en analyser les relations. Il importe aussi à l’éditeur de mettre le système d’encodage automatique développé pour Gloss-e et de vérifier son efficacité pour éditer des commentaires bibliques de structure différente de la Glose.

Nous n’aurions pas cependant entrepris ce travail si le texte de la Summa Psalterium ne nous avait pas été généreusement communiqué par Nicole Bériou qui l'avait fait transcrire à son usage par la société Word Pro à Pondichéry il y a plusieurs décennies déjà. La préparation du colloque de 2017 consacré à Philippe et différents travaux ont relancé le besoin d’une mise en ligne du document dans un format exploitable. La transcription en avait cependant été effectuée par des opérateurs ignorant tout de la paléographie latine, reproduisait méticuleusement l'édition de 1523 à l'identique, reproduisant jusqu’à ses fautes, sans développer les abréviations encore drastiques en usage au début du 16e siècle. Le produit brut appelait donc une  révision. Celle-ci est aujourd'hui suffisamment avancée - bien qu'encore très imparfaite - pour que le texte puisse être publié et surtout pour qu’on puisse commencer à le faire dialoguer avec les autres corpus de la collection. 

La mise à disposition du public de la Summa appelait en effet aussi un contexte qui permette d'en exploiter les ressources grâce au croisement des sources. Nous avons donc pris occasion du programme Comment-R du Labex HASTEC (2011-2019), puis de l'élargissement documentaire et technique offert par Gloss-e 2.0, pour mettre ce nouvel instrument de recherche et d'édition à l'épreuve de textes structurés différemment.

Notre édition

Nous éditons donc ici le texte de l’édition princeps de 1523[1]. Nous respectons l’ordre de la collection imprimée, seul en usage dans la littérature scientifique, bien qu’il diffère de l’ordre des collections manuscrites où les prohemia 2 et 3 semblent exceptionnellement placés en tête des collections. Le texte des prologues 1 et 3 est édité à partir de quelques manuscrits. Nous publions l’édition que nous en avions préparée dans notre thèse de doctorat, légèrement modifiée et adaptée à la ratio editionis de Gloss-e[2]. Pour le reste de l'œuvre, nous signalons ponctuellement quelques leçons variantes et quelques observations faites sur manuscrits.

De nombreuses abréviations paléographiques avaient été laissées en l’état et les citations bibliques, très abrégées selon la pratique médiévale, ont été corrigées, développées et sont progressivement identifiées. Les citations bibliques abrégées par suspension dans l’édition, sont développées en priorité à partir des passages parallèles à l’intérieur de la Summa, ou, à défaut et avec prudence, selon la version de la Vulgate parisienne. Pour faciliter la recherche électronique, les graphies des noms propres et des formes latines sont en cours de normalisation selon les principes adoptés pour Gloss-e (Index graphiarum editionum). Pour faciliter le repérage des citations bibliques (voir "recherche avancée") -  dans l’attente d’une identification systématique par livre, chapitre et verset - les références bibliques ont été normalisés dans le texte, selon le système d’abréviations uniforme adopté pour Gloss-e (voir ici Bibliae libri). Lorsque les citations bibliques sont vérifiées et identifiées par livre, chapitre et verset, la forme médiévale, irrégulière d’un passage à l’autre, est restituée en toutes lettres et la référence abrégée reportée dans l’apparat des sources. Des liens hypertexte vers les images de l’édition accessibles en lignes permettront au lecteur de vérifier par lui-même certaines lectures non encore corrigées.

A la division en sermons de l’édition princeps, dont nous gardons la numérotation, notre édition ajoute une structuration biblique par Psaume. Il est donc possible de rechercher soit un sermon par son numéro de référence, soit le même texte par le numéro du Psaume et des versets qu’il commente.

Les rubriques de l’édition princeps sont absentes des manuscrits examinés (ici précédés de $). Nous gardons, même dans les sermons édités à partir de manuscrits, la subdivision alphabétique de l’édition princeps afin de faciliter le référencement et le repérage des citations.

Faut-il le dire, ce travail, entrepris inter sollicitudines – est très imparfait. Il appelle encore de nombreuses interventions, mais il est suffisamment avancé, espérons-nous, pour être exploitable et surtout pour ne pas rester davantage sous le boisseau. Son encodage en format xml/tei permettra, grâce aux indexations des moteurs de recherche en ligne, de le mettre à la libre disposition du plus grand nombre.

Philippus Cancellarius - (1224-1231 c.?) – sec. – Parisiis Commentaires-sermons in Ps. 1-150 (333 d’après l’éd. de 1523)

Inc. 1: Exurge psalterium et cithara [Ps 56, 9; 107, 3] etc. Proverbiorum 11 dicitur «Bene consurgit diluculo qui inquirit bona». Que sunt hec bona, nisi intelligere quid sit psalterium, de quo dicitur...

(Inc. 2: Vidit Iacob in somnis scalam stantem super terram, et cacumen illius tangens cælum, et angelos quoque dei ascendentes et descendentes per eam, et dominum innixum scalæ…)

(Inc. 3: Psallite [Ps 46, 8] etc. In ecclesia volo quinque verba sensu meo loqui, ut et alios instruam etc. I. Corinth. 14 Hæc quinque verba possunt dici que continentur in psalmo 46: ‘Psallite Deo nostro, psallite: psallite, regi nostro psallite. Quoniam rex omnis terræ Deus, psallite sapienter’. Ubi quinquies dicitur psallite..

Sermon 1, Ps 1: De mala arbore et fructu eius, Et nimia festinatione ac tardatione. Et erit tanquam lignum, … in tempore suo etc. Hoc lignum quod sic plantatur potest dici vir spiritualis, qui est arbor inuersa, cuius radix in cælo.. ;

Sermo 330, Ps 150: ... Istis cantibus assunt angeli. unde Psal. Preueniunt principes coniuncti psallentibus etc. Et Cantic. vltimo ad finem. Que habitas in hortis, amici auscultant: fac me audire vocem tuam. Quam nos in patria audire concedat, qui in trinitate perfecta viuit Deus et regnat. Amen.

Répertoires

RB-06952 (+suppl.)

RB-06952, 1-3: Tabule in Philippi Cancellarii Summa in Ps.

RLS, t. 4 (1972), p. 818, 848-868 (d’après l’éd. de 1523) n° 390-723;

Glorieux, Rép. théol., 119, t. 1, p. 283;

Landgraf, Introduction à l’histoire…, p. 180, n° 13243.

Manuscrits

1.        Alençon, BM 154: xiiie s.; f. 1-139; init. mutil.; RB; Philippus Cancellarius (explic.); [Sermo 20]… simulavit de infirmitate carnis [Ps. 9, 29]

2.        Berlin, Staatsbibl. Theol. Fol. 48; f. 001-158; RB;

3.        Bruxelles, Bibl. Royale 0235 (4183);?; Ps 1-150; RB;

4.        Cambridge, Univ. Ji III 27, Ps. 1-150; RB;

5.        Durham, Dean & Chapter Library A II 21; Ps 1-150; RB;

6.        Eichstätt 145; xive s. ¾; f. 111v-112r; Prol.; RB; Exurge

7.        Klosterneuburg, Stiftsbibl., CCl. 910 ; RB

8.        Leipzig, Universitätsbibl. 149 ; RB

9.        Liverpool, Univ. F.4.7. ; RB-06952+suppl.; Philippus Cancellarius; Exurge Psalterium

10.     London, BL, Arundel 245 ; RB

11.     London, St Paul’s Cathedral, ms. 6;?;  RLS, RB-om.

12.     $Lyon, BM 453; 1250-1300 ?; f. 1-250; anonyme, Ps. 1,3-151 (? milieu); RB-om.

13.     Oxford, Bodleian, Bodl. 00745 (SC 2764) ; RB;

14.     Oxford, Bodleian, Digby 045;? avec tables; RB + RB-06952,2 et + RB-06952,3

15.     Oxford, St John's College 118;?; RB

16.     Paris, BSG, Rés. 1442; 1200-1230; Anonyme. Ps 70-78; 9 (serm. 22) à 13 (serm. 33); RB-om.

17.     Paris, BnF, lat. 12416, f. 104ra-199v (200 blanc): Paris, 1215-1230, prov. St-Germain-des-Prés; divisé en en 5 livres (1 = 60 sermons (f. 126ra); 2 = 65 sermons; 3 = 60 sermons (f. 147rb-164rb); 4 = 61 sermons, tous numérotés jusqu'au f. 179vb; 5 = 59 sermons non numérotés, mais pris en compte dans la table qui suit le texte suivi immédiatement d'une table de première main sur 3 col. de 60 lignes (f. 197rc-198rc, 199rb (manus)-200ra34, renvoyant aux sermons de chaque livre («XV tercii»). Inc. Exurge psalterium

18.     $Paris, BnF, lat. 14594; 1200-1250; 003ra-194vb; Ps. 1-150; Cancellarius Parisiensis; Exurge psalterium

19.     $Paris, BnF, lat. 16467; 1230-1250?; 005ra-125vb17; Ps. 1-150; RB, RLS; inc. Exurge psalterium

20.     $Paris, BnF, lat. 16468; 1230 c.?; 001ra-122vb; Ps. 1-150; RB, RLS; inc. Exurge psalterium

21.     $Paris, BnF, lat. 17515; 1230-1250; 001ra-180rb (fin de col. blanche); 001-150; RB; inc. Exurge psalterium et cithara

22.     $Paris, BnF, lat. 17981; 1240-1250; 001ra-154vb; Ps. 17-150 (début et fin manquent); RB; anon.; ---

23.     $Paris, Mazarine 0215; 1240-1250; 011ra-235vb; PS. 1-150; RB; inc. Exurge Psalterium

24.     $Paris, Mazarine 0627; 1250-1270; 131-226; RB

25.     $Paris, Mazarine 1018; 1250-1270; 1ra-174; RB; Exurge Psalterium

26.     Roma, Angelica 444  (D.5.13.); 1200-1225; f. 3ra-116vb; Ps. 1-150; RB; Exurge Psalterium

27.     Soissons, BM 065;?  RB

28.     Torino, Naz. 455;? avec tables; RB + RB-06952,1

29.     Tours, BM 96;?; f. 5-111v; Ps. 1-150; RB; Exurge psalterium et cythara

30.     $Troyes, BM 953; xiiie s. 3/3; f. 1-128v; 305 pièces d'après le nombre des initiales peintes; indications marginales des occasions liturgiques de certains sermons; RB RLS; Exurge psalterium; Vidit Iacob.

31.     $Troyes, BM 1100; 1200-1300; f. 171-200v; 228-237; RB-om.; RLS 56, 57, 60, 59, 61, 19, 32, 33, 84, 67, 86, 69, 80, 45, 50, 214, 331, 66, 68, 69;

32.     $Troyes, BM 2000, recueil factice ;  f. 79-101: 1200-1300; Ps. 1,3; 17,9; 56,9; RB; anonyme, inc. Exurge Psalterium

33.     Uppsala, C 145;?; RB

34.     $Valenciennes, BM 18, f. 16r-; xiiie s. ¼ ; prov. St-Amand; RB; inc. Exurge exurge psalterium, précédé et suivi d’autres séries de sermons sur les Psaumes à examiner.

35.     $Vaticano, BAV, Vat. lat. 9877, f. 1ra-144vb: Italie? (main parisienne) 1225-1230 c., prov. Assise, OFM (Exurge; Vidit Iacob; Et erit tanquam; Novit Dominus; Quare fremuerunt; Disrumpamus vincula […] Nisi Dominus edificaverit [=In Ps 126, n° 284]; soit 273 sermons environ, d’après les initiales rubriquées; certains sermons paraissent manquer, pas fait de collation systématique). «Istum librum emit domnus M. Card. a mon<achis ou monasterio> Sancte Marie de Palazolo». (Plusieurs monastères italiens répondent au titre de Sainte Marie de Palatiolo, probablement l’abbaye cistercienne de Ste-Marie de Palatiolis in Urbe; cf. A. Lubin, Abbatiarum Italiae brevis notitia, Rome, 1693, p. 273 ou, «in diocesi di Albano?» selon Catalogue: Assise (Cenci) p. 11, n. 6. Le donateur fut protecteur des frères mineurs de 1279 à 1305; RB.

36.     Wolfenbüttel, Hzg. August-Bibl. 458; Ps. 1-150; RB.

37.     olim Exeter, Rogerus de Thoriz n° 13; perdu.

38.     olim Pontigny B19; perdu.

39.     olim Tournai, St-Martin A 39=Cheltenham, Philipps 2023 perdu; RB.

Manuscrits rejetés

Münich, Bayerische Staatsbibl., Clm 03740;? (RB): contient en fait le commentaire de Philippe sur les épîtres selon Lerner, 2007, p. 6, n. 3.

$Troyes, BM 1417; RB ne contient pas la Summa super Psalterium mais les sermons sur les dimanches et fêtes de Philippe

Éditions

Ed2022 : M. Morard, ed., Philippi Cancellarii Parisiensis Summa super Psalterium, Paris, IRHT-CNRS, 2022 (Gloss.e) [édition électronique évolutive, texte de Ed1523 amendé].

Ed2008 : M. Morard, Sermon Exurge Psalterium (proemium 3), Corpus prol. in id., La Harpe des clercs, 2008, p. 2363-2366.

Ed2008 : M. Morard, Sermon Vidit Iacob (proemium 1): Corpus prol. Corpus prol. in id., La Harpe des clercs, 2008, p. 2367-2372.

Ed1600 : Brescia (?=Brixiae), 1600 ($ BAV, Barberini U.V.103): même texte que l’édition princeps, mais foliotation différente.

Ed1523 :  Philippi Cancellarii alias Philippi de Greve cancellarii Parisiensis in Psalterium Davidicum 330 sermones {f. III r} Philippi de Greve, cancellarii Parisiensis. In Psalterium Davidicum. CCCXXX sermones. Venundantur Iodoco Badio sub gratia et privilegio ad finem explicandis. 2 vol. [deux foliotations successives: sermons 1-162 et 163-230]. Serait en fait de 1533 selon Lerner, 2007, p. 5, n. 3. ($ BAV, Racc. I.V.560)

Bibliographie

G. Dahan, « Philippe le Chancelier et l’exégèse de la Bible», dans id., dir., Philippe le Chancelier prédicateur, théologien et poète parisien du début du XIIIe siècle, Turnhout, 2017.

Anne-Zoé Rillon-Marne, « Prédication, poésie et musique. La dimension sonore dans l’œuvre de Philippe le Chancelier », dans Prédication et performance du xiie au xvie siècle, dir. M. Bouhaïk-Gironès, M.-A. Polo de Beaulieu, Paris, 2013, p. 47-70.

R. H. Lerner, «Philip the Cancellor Greets the Early Dominicans in Paris», 2007, p. 5-17.

N. Bériou, «Les prologues de recueils de sermons latins», 2000, p. 398, 407.

J. Longère, La prédication médiévale, p. 89-90.

N. Bériou, art. «Philippe le Chancellier», DS, t. #, col. 1292;

N. Bériou, «La reportation des sermons parisiens à la fin du xiiie siècle», Medioevo e Rinascimento, 3 (1989), 87-123 (cite ms. Paris, BnF, lat. 16468, p. 101, n. 47).

J.-B. Schneyer, Die Sittenkritik in der Predigen Philipps des Kanzlers, Münster 1963 [cf. Scriptorium 17 (1963), BC 897; 20 (1966) 491]; cf. Lacombe, Vie de Prévostin, p. 126.

Principaux titres donnés par les manuscrits

 

Summa super themata Psalterii

 

Distinctiones Philippi Cancellarii Parisiensisi super psalterium cum Summa sermonum subtilium que incipit Quasi diluculum", d'après Humphreys, Friars'Library, CBMLC 1, p. 211n°13 (perdu: Exeter, Rogerus de Thoriz n° 13

xiiie s. 

Distinctiones super Psalterium (Troyes, BM 1100)

1215-1230

Opus… super quosdam versus Psalterii (Valenciennes, BM 18, f. 18)

1215-1230 

Summa magistri Philippi cancellarii super Psalterium (Paris, BnF, lat. 12416)

1225-1230

Tractatus super psalterium (Vaticano, BAV, Vat. lat. 09877)

1230-1250

Sermones super psalterium de conpendio (f. 1 pr. m.) (Paris, BnF, lat. 17515)

1230-1250?

Liber sermonum super psalterium (BnF, lat. 16467)

1240-1250

Expositiones cancellarii Parisiensis (Paris, Mazarine 215; f. 11ra)

Attributions rejetées

Philippe de Grève par Josse Bade dans l’édition de 1522/1523.

Augustin d’Ancône: mss. An444 (Oxford, S. John. Bapt. Coll. 118) > Spicq, p. 344 > Glorieux, Rép. théol., 409, t. 2, p. 327 considère cette attribution comme douteuse; om. A. Zumkeller, Manuskripte …, 1966, p. 67-80, § 140; RB-om. t. 2, p. 152-162.

Paris, BnF, lat. 444

Nota 1

La Summa super Psalterium ne semble pas avoir fait l’objet d’une diffusion par exemplar e pecia contrairement à la prédication de Philippe pour les dimanches et fêtes et à la Summa de bono, selon Murano 2005 :  Opere diffuse per exemplar e pecia, p. 694-695 ; voir cependant Non daté. L.-J. Bataillon, «Les textes théologiques et philosophiques…», p. 158-159.

Contrairement à l’édition de 1523, la majorité des manuscrits consultés commencent avec le sermon Exurge Psalterium (RLS 392) pour seul prologue. Les sermons Vidit Iacob (RLS 390) et In Ecclesia volo quinque verba (RLS 391), présentés par l’édition comme Proemium I et III sont absents des manuscrits consultés. Les manuscrits omettent les titres des sermons donnés par l’édition.

Nota 2

Evoque les ordres mendiants (fratres) (serm. 97) et spécialement les dominicains («ordo predicatorum»): «Adherere mundo non est bonum, quia bona temporalia sunt quasi viscus et glutinum quibus penne contemplativorum et spiritualium inviscantur et volare non possunt. Unde, cum quidam diceret fratribus de ordine predicatorum: ‘Bonum esset vos habere terras et vineas et homini, ad sustentationem’, respondit quidam ex eis: ‘Nolite coram nobis ponere viscum et laqueos quibus capiamur’. Unde in hoc Psalmo «Veruntamen propter dolos posuisti eis» etc. Et Sapien. xiiii. «Creature Dei in odium facte sunt et in tentationem anime hominum, et in muscipulam pedibus insipientium.»; et I ad Thimot<heum> vi «Habentes alimenta et quibus tegamur his contenti simus.» Nam qui volunt divites fieri incidunt in tentationes, et in laqueum diaboli, et de sideria multa, et inutilia que mergunt homines in interitum et perditionem.» (Sermon 152 in Ps. 72, f. 297v (refus des possessions temporelles); Sermon 121 in Ps. 59; Sermon 119 in Ps 58 (canes); Sermon 130 in Ps 64; Sermon 164 in Ps 77 (l’ordre des prêcheurs ne pourrait durer faute de moyens de subsistance); sur ces passages, cf. Lerner (2007).

Nota 3

sermo 75, f. 146r: critique des moines noirs qui vivent magnifiquement sous leur cilice.

sermo 127, f. 245r: critique acerbe des moines blancs et noirs «Conventus itaque malignantium congregatio est malorum. Ex quibus alii sunt tanqua nigri monachi diaboli, alii tanqua albi […] quibus alii sunt tanqua<m> nigri monachi diaboli »; « albi monachi diaboli sunt hypocrite » (f. 246r).

Sources

- Classiques latins: Cicéron (Tullius), Claudianus, Juvénal, Horace, Lucain, Ovide, Persius, Prudence, Sénèque, Virgile, etc.

- Pères de l’Église: Augustin, Grégoire le Grand.

- Auteurs ecclésiastiques: Bernard de Clairvaux (fréquent), Boèce, la Glose (in Math., Gal.), Ribaldus.

- Aristote: douze références à Aristote, la plupart dans le Liber de natura animalium, trois dans l’Ethique (identifiées par Lerner, 2007, p. 16-17). Lerner identifie l’expression « Quia iuxta verbum Aristotelis: omnis ambitiosus liberalis » (sermo 195, t. 2, f. 48r) avec Aristote, Ethic., 4, 2 (1122a28-29). Les traductions qui circulent au xiiie s. ont ici «Magnificus quidem enim liberalis» (Leon. t. 47, p. 217.29). Le quatrième livre de l’Ethique ne fait pas partie de l’Ethica vetus, quant à l’Ethica nova en circulation à partir des années 1217-1220, il n’en subsiste que des fragments en dehors du livre I. Selon Lerner, on se trouverait en face d’un de ces fragments. En réalité, la formule «nam ambitiosi liberales» figure dans l’Ethica vetus de Boèce (Analytica priora, Becker 70a).

Date

Au sermon 119, f. 129r°, Philippe fait la même comparaison qu’Hugues de St-Cher entre les chiens qui reviennent vers le soir et l’ordo predicatorum. L’image, reprise de la bulle de canonisation de saint Dominique, indiquerait 1234 comme terminus post quem. Mais selon Lerner (2007), la Summa serait à dater des années 1220-1223 en raison des éléments suivants:

- absence de mention des Franciscains qui se sont déployés à Paris qu’à partir de 1223.

- la mention de doutes émis au sujet de la possibilité des frères prêcheurs à subsister matériellement, « ordo Predicatorum non posset diu durare» (sermo 164, t. 2, f. 4v), est omise par certains manuscrits.

- mention des titres d’Amaury « comte de Montfort, marquis de Provence, duc de Narbonne, comte de Toulouse » (sermo 100, f. 198r) comme exemple de pompe mondaine, que Lerner juge « impolitic » après 1224, puisque Philippe a soutenu la Croisade de Louis VIII à laquelle s’était jointe Amaury de Montfort. Mais faut-il vraiment penser qu’un prédicateur se soit dispensé de jugement moral sur les laïcs qu’il avait mission de former? Par ailleurs, Amaury n’a jamais eu droit ni au titre de marquis de Provence, ni à celui de « comte » de Montfort avant 1224. Le 29 octobre 1222 (Cartulaire de l’abbaye des Vaux de Cernay n°231), Amaury se qualifie de «dux Narbonensis, comes Tolosanus et Leycestrensis et dominus Montisfortis». En février 1224 (n.s.), Amaury renonce à ses titres en faveur de Louis VIII dans un acte où il ne se qualifie que de « dominus Montisfortis ». (Layettes n° 1631). En cette même année, le titre de comte de Toulouse, duc de Narbonne et marquis de Provence est porté par Raimond VII de Toulouse dans une lettre qu’il adresse au roi de France (Layettes n° 1658). En novembre 1224, Amaury se contente encore des titres de « dux Narbone, comes Tholose et dominus Montisfortis» (Arch. nat., registre JJ 34, f. 41r). Amaury ne prend donc le titre de comte de Montfort qu’entre la fin 1224 et 1226 (décembre 1226, Layettes n°1899 et Cartulaire des Vaux de Cernay n° 268), en échange de sa renonciation à ses revendications sur l’Occitanie en faveur de la couronne de France. Mais tant en 1224 qu’en 1226 Amaury ne se qualifie ni de comte de Toulouse, ni de marquis. A partir de 1231, Amaury, comte de Montfort est connétable de France, titre qu’il ne porte pas dans tous les actes. Par conséquent, le passage de la Summa de Philippe le Chancelier, et tout spécialement l’appellation « comes Montisfortis », sous la plume d’un parisien sujet du roi de France, ne se conçoit guère avant 1224-1226. Ni Amaury ni Simon de Montfort n’avaient porté le titre de comte de Montfort avant 1224. Après 1231, le titre de Connétable de France aurait sans doute été mentionné. Il aurait aussi été « impolitic » de qualifier Amaury de marquis de Provence alors que le titre était légitimement porté par Raymond VII que d’omettre son titre de connétable après 1231.

Quant au titre de marquis, c’est à tort qu’A. Giry le considère comme inusité en France au xiiie s. (Manuel de diplomatique, p. 327). Raimond VII de Toulouse le porte dans un acte de 1240 (Archives Nationales / registre JJ 19 / f°22r°&v°).

Je pense surtout que l’exemple de Philippe le Chancellier est fictif et ne doit pas être serré de trop près, car il ne correspond à aucune situation historique ou diplomatique réelle.

En conséquence, il faut plutôt dater la Summa de la fin des années 1225-1230. La formule « marchio illius loci » est primitive parce que les comtes de Montfort n’ont jamais porté le titre de marquis de Provence; Philippe forge une formule imaginaire pour illustrer son propos.



[1] Il faudrait plutôt le dater de 1533 selon R. E. Lerner, «Philip the Cancellor Greets the Early Dominicans in Paris», AFP 77 (2007), p. 5-17, ici p. 5, note 3.

[2] Cf. M. Morard, Corpus prologorum, in id., La Harpe des clercs, Paris-IV Sorbonne, 2008, p. 2363-2366 et 2367-2372.


Comment citer cette page ?
Martin Morard, Introduction à la "Summa super Psalterium Philippi Cancellarii" in : Sacra Pagina, IRHT-CNRS, 2024. Consultation du 01/05/2024. (Permalink : https://gloss-e.irht.cnrs.fr/php/page.php?id=8)